Le serment de Nantes de Ségolène Royal

Publié le par Hervé


J'étais hier soir parmi les 9 000 (et non 4 000 comme l'indiquent certains médias) sympathisants à Nantes au meeting de Ségolène Royal.

Une remarque en préambule : très peu de forces de police, ou alors très discrètes, à la différence du meeting de Nicolas Sarkozy dans la même salle, où j'avais vu dans les proches environs du Zénith pas moins d'une dizaine de cars de CRS pour assurer "le maintien de l'ordre" selon la formule consacrée du l'ex-Ministre de l'Intérieur.
Au passage, j'ai discuté hier soir avec un vigile de la salle, il m'a confirmé que, comme je le savais pour le meeting de Lanester près de Lorient le 03 avril dernier, le meeting de Nicolas Sakorzy au Zénith de Nantes était t-r-u-f-f-é de policiers en civil. Et mieux  valait pour les indécis ne pas réagir de façon trop virulente aux propos énoncés s'ils ne voulaient pas se faire regarder de travers. Encore un signe de son obsession sécuritaire ? Une ex-conseillère municipale de Lorient me disait dans la file d'attente que des amis à elle s'était rendus à Lanester et avaient été stupéfaits par les fouilles et la présence policière dans la salle.

En entrant dans le Zénith dont le parterre était vide de chaises (quel chef d'oeuvre, cette salle neuve !), je me suis souvenu des élus UMP (Fillon, Bachelot, Boutin, Pinte, et autres) assis et alignés en rangs d'oignons devant leur chef que j'avais vus quelque peu sur la web télé de sarkozy.fr.

Rien à voir avec le parterre de ce soir, envahi par toute la jeunesse de la région DEBOUT.
Bon, oublions (enfin pas trop quand même, pour dimanche prochain) ces aspects bien négatifs de la campagne électorale UMP à l'Ouest de la France.

La soirée de Ségolène a commencé par un concert improvisé du groupe Tri Yann qui jouait à domicile. Fallait oser, la petite gavotte dont les paroles étaient tirées des mesures du Pacte Présidentiel !

Le député-maire de Nantes, Jean-Marc Ayrault, a ensuite succédé à la tribune, fier comme nous d'accueillir si chaleureusement notre candidate, et peut-être parfois impressionné par l'enthousiasme et la liesse de la salle qui commençait alors à monter.

Ensuite, Robert Badinter, ex-Ministre de la Justice du Président François Mitterand, auteur de la loi d’abolition de la peine de mort de 1981, est venu rappeler en grand sage (sa voix parfois tonnante avait des accents de Gandalf dans «Le Seigneur des Anneaux», je vous jure, c'en était troublant !) le parcours du Parti Socialiste jalonné de victoires sociales majeures du siècle passé mais toujours gardées, qu'il s'agisse des congés payés, de la réduction du temps de travail, du droit à la retraite après une vie laborieuse, ou bien aujourd’hui de la défense de la Sécurité Sociale solidaire menacée.

Il n'a pas manqué d'épingler le candidat Nicolas Sarkozy sur le hold-up pratiqué à son compte des figures historiques du PS que sont Léon Blum, Jean Jaurès, ou Aristide Briand.
Pour être complet, Robert Badinter a souhaité les compléter par d'autres, funestes références de cette ancienne époque, liées aux thèses d'identité nationale actuellement développées par le candidat UMP dans sa chasse aux voix Front National :  Maurice Barrès, champion des anti-Dreyfusards, que Nicolas Sarkozy cite dans un de ses discours à Metz ici, ou pire encore, Charles Maurras, inspirateur du régime de Vichy, homme de l’Action Française : «celui qui voulait défendre la nation contre l’ennemi, l’étranger de l’intérieur».
Comme le dit Robert Badinter : "Nicolas Sarkozy aime bien les grands noms du Parti Socialiste, mais à une SEULE condition :
qu'ils soient morts !".

Alors la candidate Ségolène Royal est arrivée dans la salle, déclenchant un tonnerre d'encouragements et d'applaudissements.

Peut-être un peu marquée au début par quelques signes de fatigue (je ne sais pas comment les candidats font pour tenir le choc d'une campagne !), elle a pu s'appuyer rapidement sur la liesse d'une salle toute à sa cause.

Pour cette avant-dernière réunion de campagne du 1er tour, Ségolène a développé les thèmes suivants :

- réforme de la démocratie représentative, de la démocratie sociale, territoriale et participative par voix de référendum,
- des valeurs humaines à défendre plutôt que des valeurs boursières,
- un pouvoir qui perde de son arrogance et retrouve sa puissance au service de l'intérêt général : ainsi, le Conseil Supérieur de la Magistrature sera restructuré et ne sera plus présidé par le Président de la République,
- fin du cumul des mandats,
- revalorisation du rôle du Parlement : contrôle de l'application des lois déjà votées, possibilité de refus de vote d'une loi ministérielle si une précédente n'est pas appliquée.
- consultation du Parlement sur les engagements internationaux, sur les ventes d'armes,
- suppression de l'article 49-3,
- renforcement des libertés publiques qui ont été profondément affaiblies au cours de ces cinq dernières années : relever la Commission Nationale Informatique et Libertés, la Commission nationale de déontologie de la sécurité, et renforcer les moyens de la Haute autorité de lutte contre les discriminations (halde),
- les membres du CSA seront désignés par le Parlement à une majorité des 3/5èmes,
- en ce qui concerne la liberté de la presse : proposition au Parlement de renforcer les pouvoirs des sociétés de rédacteurs ; comme la profession de journaliste le demande : droit d’opposition à la nomination du directeur de la rédaction (exemple récent à Libération), représentation de droit au conseil d’administration, au conseil de surveillance, consultation sur le code de déontologie, droit d’observation sur les manquements à la déontologie rédactionnelle.

- défense des valeurs républicaines et laïques (comme le prônait Aristide Briand en 1905 avec la loi de séparation Etat/église que veut remettre en cause Nicolas Sarkozy !) face aux terrorismes et aux intégrismes
- lutte contre les crimes et délits faites aux femmes et enfants décrétée grande cause nationale (Ségolène Royal s'est entretenue dans la journée par téléphone avec la maman de Sophie Gravaud, Jean-Marc Ayrault lui avait aussi rendu hommage en tout début de son discours, en l'assurant de l'émotion et du soutien de TOUTE la population nantaise), mise en place d'établissements de suivi, utilisation de bracelet électronique à leur sortie

- amélioration de la compétitivité des entreprises par un dialogue social renforcé et de qualité, notamment par un encouragement pécuniaire des salariés et entreprises à développer la représentativité des syndicats
- réunion d'une Conférence nationale de la croissance, et des revenus
- investissement massif dans la formation professionnelle, l'innovation, la recherche

Plusieurs fois au cours de son discours, Ségolène Royal s'est faite interrompre par des choeurs surpuissants : "Ségolène Présidente ! Ségolène Présidente !" ou encore, carrément plus direct (et au bout d'un moment, j'en étais, c'est venu tout seul) : "On va gagner ! On va gagner !". L'émotion était visible sur son visage, j'étais tout près ! ;-)
Même les élus dans les coulisses étaient impressionnés par tant de liesse et de joie dans la salle bondée. Les retardataires qui n'avait pas pu entrer dans la salle ont pu suivre le meeting sur écran géant à l'extérieur.

Mon choix était fait depuis sa précédente venue à Nantes et le vote interne au PS du 16 novembre.
Mais ce choix est de plus en plus conforté par l'attitude de la candidate, la tête sur les épaules, ne cédant pas aux provocations basses de la droite et de l'extrême droite (y a-t-il encore seulement une différence dans le ton ???).
Je n'ai que faire des critiques qu'on entend sur elle, ses prétendues lacunes (qui se repèrent ensuite chez ses concurrents).
Avez-vous aussi remarqué qu'on n'entend plus sur les ondes ces dames de l'UMP que sont Rachida Dati et Nadine Morano ? Pour ce qui est de Nadine Morano, un seul faux pas dans les médias a suffit pour la faire éloigner du staff du candidat, elle se retrouve maintenant dans les meetings de rase campagne (pour lesquels j'ai du respect, j'y suis à Nort sur Erdre).
Ségolène reste-t-elle la seule femme à pouvoir faire face au hargneux de la rue d'Enghien et à "sa" France d'après ?

Pour moi, il y a clairement opposition entre notre projet et celui de la droite dure : celui-ci s'est dangereusement rapproché la semaine dernière de thèses géniques, refoulant les capacités de l'homme à pouvoir influer sur ses décisions et son parcours personnel. Et dangereusement rapproché des thèses d'extrême droite comme l'avait rappelé en début de soirée Robert Badinter, et avant, les observations sur le terrain échangées avec d'autres militants ce soir.

En espérant vous avoir éclairé sur votre choix pour dimanche.
Et en espérant pouvoir disposer d'un entre deux tours pour développer encore plus cette confrontation si riche, projet contre projet.

Publié dans Politique

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